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jeudi 19 septembre 2013

Ni anges, ni démons

L’intégration multiculturelles dans un pays ouvert versus la simple cohabitation de communautés qui se tolèrent plus ou moins dans un pays hôte, c’est la même différence qu’entre un vrai gâteau au chocolat-bananes aux milles saveurs et une salade de fruits. Dans un cas, on mélange, on fusionne, on émulsionne des ingrédients qui se modifient et s’enrichissent mutuellement. Dans l’autre, on ne fait que mettre ensemble des fruits sans réellement les modifier. Et on n’oublie pas de saupoudrer de belles paroles sucrées et de belles intentions pour changer le goût. Je préfère, et de loin, le gâteau. Dans tout ce que j’entends autour de moi, je m’aperçois qu’on confond culture et religion. C’est pourtant tout de même très différent. C’est vrai, le fait religieux peut faire partie d’une culture, voire même l’imprégner complètement. C’était la norme dans les siècles passés, mais ça l’est de moins en moins, « Dieu » merci. Il y a eu assez de tapages de gueules meurtriers entre nations pour ce seul prétexte, celui du païen, de l’incroyant ou de l’hérétique indésirable du pays d’en face. C’est bien connu, le démon est dans l’autre et sa croyance impie, croix de bois, croix de fer, si je mens... Voilà donc pourquoi, et comme Victor Hugo le disait si bien, je prône « l’État chez lui , l’Église chez elle, ». Les deux ensembles ne font pas un bon ménage pour les peuples qu'ils gouvernent. La religion est d'abord et avant tout du domaine du privé, du personnel, du spirituel. Après tout, chacune d’elle revendique détenir La Vérité. Ce qui n'est pas rien tout de même quand on y pense. Ça fait pas mal de pauvres "bougres et bougresses" enchaînées, tailladés, écorchés, lapidés, rejetés, excommuniés et j’en passe, depuis des siècles, pour n’avoir pas su être "dans le vrai", pour "s’être trompé", avoir oser ne pas voiler, ou ne pas se conformer à la pratique, être déclarés des hérétiques coupables. Passe encore dans le passé avec des états religions, plus ou moins éclairés, pas du tout modérés, à la science confuse et aux frontières bien délimitées. Mais aujourd’hui, alors que beaucoup d’eau (bénite ou pas) a coulé sous le pont, nous n’en sommes plus là. Les hommes et les femmes migrent et immigrent, les religions étendent leurs parts de marché et se mondialisent mais l'athéisme ou l'agnosticisme prennent également leur place. Même un inuit peut, si cela lui chante, aller prier, tourné vers la Mecque depuis le Grand Nord, à l’appel du muezzin et faire le Ramadan, alors qu’au même moment, un arabe pur laine, être plus agnostique que moi. Les occidentaux quant à eux, ont perdu l’habitude d’une religion catholique ou protestante omniprésente. Cela fait belle lurette qu’elle n’impose plus de code vestimentaire contraignant. La laïcité a surgit de ces périodes religieuses passées teintées d'obscurantisme, et s’est doucement imposée au niveau de l’état comme trait d’union des citoyens multiples du gâteau nation. À mon sens, cette capacité pour un fonctionnaire de mettre le Kipa en partant le matin mais de l’enlever une fois rendu au bureau avant d’aider un citoyen à assurer son véhicule à la SAAQ – à mon inuit de tantôt, tanné de ne pas avoir de mosquée et décidée à la chercher sur l'ïle de Montréal au volant d'un Westfalia- est la meilleure preuve de modernisme qui soit. C’est placer l’État à sa vrai place, celle d’une institution où couleurs politiques et convictions religieuses doivent rester au vestiaire. L'habit fait le moine mie de rien, loin d'être anodin quoiqu'on en dise. J'ai remarqué qu'en plus de 15 ans d’activités professionnelles dans les grandes directions informatiques des grandes entreprises en Europe et Amérique du Nord, je n’ai tout simplement jamais vu de signes religieux « ostentatware » alors que rien ne les interdit vraiment. J’ai croisé pourtant plusieurs fois des collègues profondément croyants et pratiquants. Pas différents des autres collègues, aux origines culturelles pourtant très diversifiées, d’Afrique, Inde, Asie d'Europe et d'ici. Je n’ai pas eu l’impression qu’ils se sentaient diminués en quoique ce soit, leur visage découvert devant leur clavier et écran, face aux divinités Internet, réseaux, archanges logiciels ou autres apôtres du monde digital. Entendons nous bien, je prône la liberté de culte et d’habillement dans la vie de tous les jours et je ne suis pas du tout gêné par les styles vestimentaires variés. Mais je porte une trop haute estime de l’État pour le voir malmené sur ces enjeux. Je demande aux religieux d'être modérés, de ne pas lier leur foi à la présence ou non de tel signe, symbole de vêtement, croix ou bout de tissu. L'important n'est pas ce que tu portes, mais ce que tu penses, apporte par ton humanité et tes valeurs. L’État c’est l’Institution du peuple pour le peuple. Obligatoirement rassembleur et au dessus des intérêts individuels. Pour tous, par tous, dans une approche la plus démocratique possible. L'Assemblée, le gouvernement, les institutions ou encore chaque fonctionnaire en sont les expressions les plus directes et visibles. Ne les instrumentalisons pas.Une certaine neutralité vestimentaire, constitue leur plus bel uniforme. Ni anges, ni démons.